La mise en place du STO

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Le service du travail obligatoire (STO) a constitué un élément marquant des années d’occupation ainsi qu’un point de basculement, agissant pour de nombreux Français comme un révélateur de l’asservissement du régime de Vichy aux exigences de l’Allemagne nazie. Son déploiement s’est opéré en plusieurs phases, étroitement liées à l’évolution du conflit et à la nécessité pour les usines de pallier par des travailleurs étrangers la réduction de la main d’œuvre allemande. En effet, depuis le début de l’engagement militaire contre l’URSS en 1941, les incorporations dans l’armée n’ont cessé d’augmenter, vidant par conséquent les usines allemandes de leurs travailleurs. L’idée émergea rapidement de recourir, par la force si nécessaire, aux travailleurs des pays occupés. Ainsi, en 1944, 8 millions d’étrangers travaillaient dans les usines du Reich.1

Concernant la France, et donc l’Eure-et-Loir, dans un premier temps, les prisonniers de guerre furent réquisitionnés, puis les ouvriers d’entreprises françaises dans le cadre des chantiers de l’organisation Todt. En parallèle, on permit les recrutements volontaires pour l’Allemagne en installant des bureaux de placement dans les territoires occupés.

Face au faible succès de ces mesures et à l’accroissement des besoins côté allemand, une politique de recrutement forcé fut mise en place, pilotée depuis l’Allemagne par Fritz Sauckel en collaboration avec le régime de Vichy, et notamment Pierre Laval. Deux systèmes se succédèrent : la relève, puis le STO. La relève permettait en théorie le retour d’un prisonnier de guerre français dans ses foyers contre le départ de trois travailleurs pour l’Allemagne. Un objectif de 250 000 ouvriers fut fixé par Sauckel, dont l’accomplissement fut confié sur le terrain aux bureaux de placement français et allemands. Il ne fut cependant pas atteint, et la relève s’avéra un échec avec le départ de 40 000 ouvriers, soit à peine 16 % des attentes2. Par conséquent, la loi du 4 septembre 1942 permet le recrutement forcé et, si nécessaire, l’envoi en Allemagne des jeunes gens de 21 à 25 ans. Ces nouvelles mesures ne permettent pas de répondre à l’exigence de 250 000 travailleurs supplémentaires fixée par l’Allemagne début 1943. C’est dans ce contexte que la loi du 16 février 1943 instaure le service du travail obligatoire (STO) : tout homme âgé de 20 à 50 peut être réquisitionné pour 2 ans. Dès la mise en place du STO, les classes d’âge 1920-1922 sont mobilisées, ce qui permet d’atteindre l’objectif de 250 000 ouvriers fixé en début d’année. Mais dès le mois d’avril, un nouveau contingent de 220 000 ouvriers est exigé en sus des ouvriers travaillant déjà pour les intérêts de l’Allemagne dans les usines françaises. Face au rejet généralisé du STO par la population française et l’accroissement du nombre de réfractaires, ce nouvel objectif n’est pas atteint. Pour autant, les exigences allemandes ne faiblissent pas.

 

1. GRIEGER (Manfred), « La politique de main d’œuvre de l’Allemagne en Europe occupée », dans La main d’œuvre française exploitée par le IIIe Reich, actes du colloque international organisé par le centre de recherche d’histoire quantitative, 13-15 décembre 2001.

2. ZIELINSKI (Bernd), « L’exploitation de la main d’œuvre française par l’Allemagne et la politique de collaboration », dans La main d’œuvre française exploitée par le IIIe Reich, op.cit.